Représentant 15% du territoire français, le Massif Central se distingue par une histoire géologique de plus de 600 millions d’années, mais dont la connaissance reste fragmentée. Son potentiel en ressources minérales et énergétiques suscite l’intérêt des industriels ce qui se traduit notamment par des demandes de permis d’exploration et de recherche minière (PER). Ce contexte suscite des questionnements, des positionnements divers, et des mobilisations au sein des populations et des autorités locales. Or, l’état actuel des connaissances géologiques et des dynamiques sociales ne permet pas un débat éclairé sur les enjeux du sous-sol et de ses potentiels usages.
Donner voix aux acteurs territoriaux tout au long des travaux de recherche
Le chantier « Massif Central » entend ainsi produire des connaissances sur le sous-sol à travers l’étude de sites pilotes choisis pour leur potentiel en métaux stratégiques et critiques, leur potentiel géothermique et leurs configurations sociologiques (contexte urbain versus milieu rural, ancien site minier ou nouveau gisement). Il vise à structurer une communauté pluridisciplinaire en géosciences, en sciences humaines, sociales et économiques, et mobilise une approche transdisciplinaire pour favoriser les interactions entre scientifiques et acteurs du territoire : associations de citoyens, industriels et décideurs politiques.
« Nous souhaitons développer une approche participative en intégrant les acteurs territoriaux sur le thème somme toute clivant des “instruments” de la transition énergétique : les ressources minérales, supposant un renouveau minier en France et ayant des conséquences territoriales, ainsi que la géothermie comme potentielle source d’énergie renouvelable. C’est pourquoi la présence et la voix des acteurs territoriaux, ainsi que la socialisation du projet sont nécessaires tout au long des travaux scientifiques » précisent Sylvia Becerra (CNRS), Florence Cagnard (BRGM) et Olivier Vanderhaeghe (Université de Toulouse), co-responsables du projet.
La réunion de lancement : point de départ d’un dialogue à long terme
L’équipe a ainsi convié des acteurs territoriaux lors de la réunion de lancement les 17 et 18 juin 2024 pour favoriser les rencontres et échanges avec les communautés scientifiques impliquées dans la construction du projet dès février 2023, et pour présenter ses objectifs et sa philosophie.
L’intention est de construire une science en conscience des enjeux territoriaux. « Nous devons plus que jamais faire sortir la science sur le sous-sol de son pré carré, d’autant plus que les sigles PEPR et PER (permis d’exploration et de recherche minière) sont très proches […] ce qui peut provoquer des amalgames entre activité scientifique et activité industrielle » soulignent les co-responsables du projet.
L’équipe a ainsi précisé que le projet « Massif Central » s’inscrit dans une temporalité longue (6 ans) et une dynamique scientifique propre, le différenciant de tout autre projet de recherche ou projet industriel en cours sur le territoire. « Nous faisons de la recherche fondamentale ce qui veut dire que nous portons une démarche de production de connaissances, et non d’exploitation des ressources du sous-sol ».
Un projet de recherche fondamentale dans le cadre du programme Sous-sol, bien commun
Le projet « Massif Central » est un l’un des 5 chantiers d’étude du PEPR Sous-sol, bien commun : un programme national de recherche de grande ampleur co-piloté par le CNRS et le BRGM. Associant 10 partenaires avec un budget d’aide de 3,4 millions d’euros, ce projet vise à :
- Produire de nouvelles connaissances sur les ressources et sociétés dans les transitions du Massif Central : notamment en caractérisant des systèmes métallogéniques associés à des substances critiques, telles que le cuivre, le tungstène, le lithium, l’antimoine ou encore le germanium et le gallium. Il s’agit également d’étudier les trajectoires territoriales de sites pilotes, les enjeux économiques et sociaux d’un redémarrage potentiel de l'exploitation minière, la construction sociale des ressources et des risques, ou encore le rôle des réglementations dans la résolution ou l'amplification de conflits. Un autre axe vise à identifier les rôles des paramètres géologiques sur les systèmes géothermiques profonds, et à déterminer si et comment la géothermie a percolé les politiques publiques à l’échelle territoriale et peut être intégrée dans des scénarios de développement territorial visant à assurer la satisfaction locale de la demande énergétique.
- Développer des outils innovants pour la caractérisation du potentiel géologique. Ce travail concerne le développement de méthodes efficaces d'acquisition et d'interprétation des données géochimiques et géophysiques, et de cartographie prédictive pour améliorer l'exploration dans le Massif Central.
- Retracer l’histoire géologique du Massif Central à travers les ressources du sous-sol et réaliser une synthèse des données publiées et nouvellement acquises dans le projet.
- Coordonner des actions inter et transdisciplinaires avec notamment la constitution d’un comité des parties prenantes et l’organisation d’ateliers annuels.

Atelier de travail lors de la réunion de lancement du projet "Massif Central"
© PEPR Sous-sol, bien commun
Il ambitionne de partager les connaissances coproduites sur les conditions géologiques et sociales dans lesquelles le Massif Central pourrait éventuellement contribuer aux transitions en cours, en vue de permettre à chacun de comprendre et de se positionner face aux enjeux de l'exploitation potentielle des ressources du sous-sol.
La réunion de lancement a permis aux différents parties prenantes de prendre connaissance du contenu du projet et d’échanger. Elle fut l’occasion de faire le point sur les connaissances de départ, et celles à acquérir, et de prendre conscience du chemin à parcourir pour croiser les regards des sciences de la terre et des sciences sociales, et des apprentissages à réaliser pour créer une culture commune de travail en vue d’un dialogue réussi.
Le consortium associe le BRGM, le CNRS, l'INRAE, les Universités de Clermont Auvergne, Montpellier, Lorraine, Paris-Saclay, Savoie-Mont Blanc, Rennes, Bourgogne Franche-Comté, et implique également l'Université Toulouse III Paul-Sabatier et l'Université d'Orléans.

Les PEPR – Programmes et Équipements Prioritaires de Recherche
Les PEPR sont des programmes scientifiques nationaux de grande ampleur, lancés dans le cadre du plan d’investissement France 2030 et opérés par l’ANR. Ils visent à consolider un leadership français dans des domaines jugés prioritaires, et liés ou susceptibles d’être liés à une transformation technologique, économique, sociétale, sanitaire ou environnementale.
Le programme de recherche « Sous-sol, bien commun » est co-piloté par le CNRS et le BRGM et est financé à hauteur de 71,4 millions d’euros sur 7 ans.
Dans un contexte d’augmentation de la demande en ressources du sous-sol à l’échelle mondiale, et face à l’enjeu d’améliorer les connaissances pour permettre un débat éclairé sur les usages potentiels du sous-sol, il vise à :
- Évaluer la demande nationale future en ressources et utilisations du sous-sol selon différents scénarios de développement national,
- Développer la connaissance du sous-sol français, évaluer les potentiels existants, et développer de nouvelles technologies d’exploration et d’exploitation,
- Analyser les enjeux et jeux d’acteurs autour des usages potentiels du sous-sol, les cadres juridiques et les impacts environnementaux.
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